Après un premier cas d’un jeune Guinéen jugé le 1er août, Fistiana est la seconde à masquer sa majorité pour bénéficier d’une aide sociale.
Mince, presque chétive, Fistiana a le physique d’une adolescente qu’elle ne serait plus depuis longtemps. C’est sur son apparence que la jeune ressortissante congolaise a comptée pour bénéficier d’un hébergement au centre départemental de l’enfance (CDE) de Plappeville, le 11 août lorsqu’elle est déposée à quelques pas des services sociaux du conseil régional. Comment y est-elle arrivée ?
Comment a-t-elle vécu depuis le 1er août, jour où le juge des libertés et de la détention interrompt la seconde prolongation de son séjour au centre régional de rétention administrative de Metz-Queuleu. ?
Le mystère est entier et habille de la même façon les interrogations sur l’âge réel de la jeune femme qui a voulu être prise en charge par le CDE en se présentant comme mineure étrangère et isolée. Les travailleurs sociaux ont eu un doute. Moins de deux semaines plus tôt ; Défodé, un jeune Guinéen prétendant être mineur alors qu’il était âgé d’au moins 19 ans, leur a demandé le même service. Fistiana se retrouve à la barre, comme lui, pour une tentative de fraude identique.
Elle aussi joue sur deux dates de naissance, mais avec un écart bien plus grand que dans le cas du jeune home. Selon le passeport évaporé on ne sait où, mais sur lequel figurait son visa, Fistiana aurait 30 ans. En revanche, sur un acte de naissance émis par les services de l’état civil de Kinshassa, elle n’aurait vu le jour qu’en 1999 et serait donc deux fois plus jeune.
La police aux frontières doute sérieusement de l’authenticité de ce second document. Le médecin qui a interprété la radio osseuse relativise lui aussi les quinze ans qu’affirme avoir la jeune fille, servie il est vrai, par une silhouette très juvénile.
« Pourquoi êtes-vous venue en France ? », interroge le président Buzon. « Parce qu’il y a des soldats, là-bas », répond la prévenue à peine audible. « Ils sont venus me chercher à l’école » ajoute-t-elle, qui serait sans nouvelle de sa mère, comme de son père, prétendument officier dans l’armée congolaise et disparu.
« Notre pays accueille, mais ne supporte pas le mensonge, la triche et la manœuvre », soulève le Procureur Gilles Bourdier en émettant l’idée que l’aide sociale à l’enfance de Moselle fait les frais d’une filière qui l’empêche d’assurer sa mission première en détournant des places déjà limitées, ouvertes à des mineurs du département réellement dans le besoin. Le ministère public requiert un mois d’emprisonnement ferme et une interdiction définitive du territoire français contre la jeune femme qui a déjà été l’objet d’une obligation de quitter l’hexagone. Une procédure qu’elle a contrariée en introduisant une demande d’asile.
La défense Me Charoulata Anandappane ne pense à rien d ‘autre qu’une relaxe pour sa cliente. La radiographie n’atteste pas avec certitude de la majorité de Fistiana : « on est incapable de déterminer un âge », avance l’avocate. Le doute sur les chiffres existe aussi sur l’intention de la prévenue de profiter d’un système et doit lui bénéficier.
Le tribunal voit les choses différemment et prononce un mois de prison avec mandat de dépôt et une interdiction de 5 ans du territoire français.
Frédéric CLAUSSE.